Envol lumineux de néons à tire-d’aileDécryptageL’artiste genevois François Moncarey a installé sur la place du Molard sa sculpture «SWARM», qui évoque le ballet automnal des étourneaux sur la Rade, dans le cadre de Geneva Lux.Par temps de brume, brillants comme des miroirs, ils sont d’un beau gris lustré. Sous le soleil, les voici mordorés, qui bruissent doucement dans le vent. Lorsque tombe le soir, à 18h, le timer s’enclenche: un éclair blanc les anime de l’intérieur, glisse, saute, plonge, remonte. Le courant les entraîne de la terre au ciel dans une sarabande hypnotique qu’on croirait éternelle. Minuit sonne, time’s up. Sur la place du Molard, les étourneaux captifs de François Moncarey s’assoupissent d’un coup, privés de jus. «Swarm» hiberne. Les volatiles reprendront demain leur entraînement à la migration. La sculpture lumineuse achetée par la Ville à l’artiste genevois pour le festival Geneva Lux participe aux illuminations jusqu’au 2 février. Posée à l’extrémité de la place côté lac, elle grimpe à 13 mètres de haut le long d’un mât en alu. Fiché dans un podestre de bois noir à six côtés, il sert habituellement d’armature au sapin de Noël du Molard. François Moncarey a habillé de haubans le désœuvré, sur lesquels il a arrimé son dispositif en cinq «coupes» aux plateaux inclinés. «Ces profils sont penchés dans la direction où s’envolent les oiseaux, formant un vortex», explique le concepteur de «Swarm». Aux flèches sont accrochés des filins, comme sur les bateaux. Les étourneaux y posent leurs pattes pour un bref repos. On vous le dit? Allez, on vous le dit! François Moncarey n’est pas un bourreau. Ni cage ni volatile dans son travail, mais 233 néons enrobés de feuilles de miroir sans tain, enroulées en forme de cône et agrafées. «Je voulais quelque chose de léger, d’aérien, de suspendu, commente l’artiste. Dans l’idéal, j’aurais accroché les filins aux façades.» Dans les néons, la lumière ne court pas au hasard. Elle est régie par un algorithme reproduisant savamment les mouvements des étourneaux qui mettent cap au sud. |
Les vols d’étourneaux sont régis par une intelligence collective: pas de chef parmi eux, mais des mouvements codés. Les oiseaux en vol restent toujours proches, mais jamais trop, 50 cm maximum, pour ne pas se heurter. Le miroir sans tain est fascinant: lorsqu’il fait jour, il reflète le monde extérieur. Lorsque le néon est allumé, le papier est transparent. «Si on n’allumait qu’une seule des 233 lampes, elle refléterait toutes les autres, comme de chaque point du cosmos, on aperçoit tout l’univers.» Pour mettre au point le logiciel qui fait pulser «Swarm», François a utilisé les équations mathématiques décrivant le vol des étourneaux. «Mais vous savez que celui-ci comporte une part d’aléatoire? Les oiseaux jouent à se faire plaisir.» «Swarm» est composée de 233 néons de grandeur identique. «J’ai utilisé ce nombre en référence à la suite de Fibonacci (ndlr: suite de nombres entiers dans laquelle chaque terme est la somme des deux qui le précèdent), que l’on retrouve souvent dans la nature», souligne l’artiste. |